En attendant l’ouverture en 2022 d’un espace dans le centre d’Athènes, la maison du peintre de 86 ans, fourmille encore des œuvres inspirées de son amour de la Méditerranée.
Dans une rue calme bordée d’orangers, à l’abri des regards et du tumulte d’Athènes, une demeure étrange se distingue quelque peu des habitations voisines. À l’entrée de la maison à trois étages, semblable à tant d’autres du quartier de Papagou, en périphérie de la capitale, un discret profil en bronze et deux oiseaux emblématiques indiquent le repaire d’Alekos Fassianos. Matisse des temps modernes, connu dans le monde entier pour ses personnages de la mythologie et du folklore grecs, son foyer regorge de curiosités et d’œuvres insoupçonnées. Une collection qui formera le cœur du musée à son nom dont l’ouverture est attendue à l’automne 2022.
Le peintre qui inventait lui-même ses couleurs, a aussi beaucoup peint en rouge, la teinte qui recouvrait la chambre de son enfance pour «donner une impression de chaleur», ou en ocre, inspiré par l’artisanat traditionnel grec. Sur ses toiles et dessins éparpillés à son domicile, échantillon de sa prolifique production, on retrouve le cycliste qu’il croisait enfant en allant à la plage, la chevelure redressée par le vent telle que décrite dans ses lectures de la mythologie, les poissons de Kea, son île favorite, les vagues rondes comme dans l’Odyssée, l’oiseau aux ailes déployées, autant de signatures emblématiques de son œuvre.
Le coloriste aux multiples talents a partagé sa vie entre la Grèce et la France, où il a étudié la lithographie à l’École nationale des Beaux-Arts et côtoyé écrivains et peintres, à l’instar de Matisse et de Picasso qu’«il admirait beaucoup». «Alekos disait que tout commence par quelque chose», rapporte son épouse, mais il se défendait d’avoir été inspiré par un artiste plutôt qu’un autre et préférait se revendiquer de 77 influenceurs. Refusant toutes les contraintes, «Alekos a toujours voulu rester libre et faisait ce qu’il voulait», traçant, sans ombre ni perspective, ses personnages puisés dans la mythologie, l’art byzantin ou naïf. Dans sa maison de Papagou, Fassianos travaillait à même le sol ou griffonnait sur le coin d’une table. Et «il détruisait ce qu’il n’aimait pas», soupire sa femme, «je pleurais, mais il savait mieux que moi ce qu’il fallait garder». L’œuvre restante sera accueillie dans les prochains mois au nord de l’Acropole, dans le quartier de la gare de Larissa.